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La radio numérique DRM fait son chemin

Grâce à son adoption en Inde, le standard de diffusion DRM continue à progresser

Par James Careless

NEW DELHI — En ce moment, le diffuseur public All India Radio AIR exploite 35 émetteurs radio ondes moyennes (AM) et deux émetteurs radio ondes courtes qui utilisent le standard de radiodiffusion Digital Radio Mondiale, dans une tentative ambitieuse de déploiement d’un tout premier service de radio numérique dans le pays.

Le récepteur radio DRM/AM/FM AV-DR-1401, construit par Avion Electronics en Inde et la première radio DRM fabriquée en Inde.
Crédit : Avion Electronics

« Les deux émetteurs ondes courtes d’AIR diffusent en mode DRM pur », a déclaré Yogendra Pal, ancien directeur général adjoint d’AIR et responsable de la section Inde du Consortium DRM, l’organisation mondiale qui promeut le standard DRM. « Sur 35 émetteurs ondes moyennes, deux fonctionnent en mode DRM pur transportant deux services audio chacun en numérique, et les 33 autres en mode diffusion simultanée.

Depuis le 7 mars, AIR a décidé de faire fonctionner 25 des émetteurs DRM ondes moyennes en DRM pur pendant une heure par jour. L’objectif ultime d’AIR est de convertir tous ses émetteurs ondes moyennes en service DRM pur. Cela se produira une fois que la pénétration des récepteurs DRM en Inde sera suffisante pour justifier l’arrêt des transmissions analogiques en ondes moyennes. Le standard original de transmission de données DRM-30 fonctionne dans les bandes inférieures à 30 MHz. Le nouveau standard DRM+ va au-delà de 30 MHz et couvre les bandes I, II et III jusqu’à 240 MHz.

De gauche à droite, Ruxandra Obreja, présidente du DRM ; George Ross, TWR, Guam ; et Alexander Zink, Fraunhofer IIS/vice-président du DRM, montrant la réception DRM sur des appareils mobiles et le récepteur radio conçu par Titus II.
Crédit : DRM

Pour le consortium DRM, dont les membres comprennent plusieurs des principaux radiodiffuseurs et fabricants d’équipements de radio du monde, l’adoption du DRM par l’Inde justifie les années de dur labeur du groupe. Bien que les radiodiffuseurs à ondes courtes, tels que la BBC, Radio France Internationale et Radio Vatican diffusent actuellement à leur public des émissions DRM limitées, AIR est le premier diffuseur important à adopter le DRM comme standard opérationnel. En faisant cela, l’Inde a validé le DRM comme format de radio numérique, un format devant être pris aussi sérieusement que le DAB/DAB+ d’Europe et la HD radio d’Amérique du Nord.

« Les déploiements de DRM en Inde sont assez spectaculaires », a déclaré la présidente du DRM, Ruxandra Obreja. « La première phase du projet a été l’installation d’émetteurs compatibles DRM. Maintenant, nous entrons dans une deuxième phase avec une forte incitation et promotion pour un meilleur son, des services non-audio à valeur ajoutée et la fabrication de récepteurs ».

Le succès du DRM avec son implantation en Inde a de fortes chances de se reproduire dans des pays comme le Pakistan et le Brésil, du moins si les plans de radio numérique des radiodiffuseurs dans ces deux pays se concrétisent. Ce qui suit ci-dessous est une analyse plus détaillée sur les progrès du DRM en Inde à ce jour, plus un coup d’oeil sur les ambitions DRM au Pakistan et au Brésil.

INDE

Avec environ 1,2 milliard de citoyens recevant actuellement les émissions de radio d’AIR, la décision d’adopter le DRM comme standard de radio numérique du pays a été faite après une réflexion minutieuse et des tests par AIR. Cette décision a été prise après que les systèmes de transmission DAB et DRM aient été testés par AIR.

All India Radio & le Centre de télévision Doordarshan, de Prasar Bharati, à Neemuch, dans le Madhya Pradesh.
Crédit : Rahultalreja11 via Wiki Commons

« AIR a sélectionné le DRM en raison de la capacité de cette technologie à fournir un son numérique parfaitement clair sur les ondes moyennes, la FM et les bandes d’ondes courtes sans interférences », a déclaré Pal, cadre retraité d’AIR qui a aidé à diriger le déploiement du DRM en Inde.

Compte tenu de la popularité des services SW d’AIR dans le monde — « disponibles dans plus de 108 pays en 27 langues en analogique », a déclaré Pal, plus le « vaste réseau d’AIR de plus de 140 émetteurs analogiques ondes moyennes desservant plus de 98 % de la population du pays », sélectionner le standard de radio numérique DRM était vraiment logique pour le diffuseur public de l’Inde.

Le fait que les émetteurs ondes moyennes compatibles avec le DRM puissent également diffuser simultanément sur ondes moyennes analogiques a scellé l’affaire. « Jusqu’à ce que les récepteurs numériques DRM soient disponibles pour une population importante, les services analogiques en ondes moyennes peuvent continuer avec le service numérique du même émetteur », a déclaré Pal. « Aucun spectre de fréquence supplémentaire n’était requis, les infrastructures existantes telles que les lignes de transmission et les mâts d’antennes n’avaient pas besoin d’être remplacées — et même les émetteurs existants pouvaient être convertis en numérique à un coût modique ».

Cela dit, AIR a acheté un certain nombre de nouveaux émetteurs compatibles DRM de Nautel, une excellente nouvelle pour le fabricant d’émetteurs canadien.

« Nautel est fier d’avoir fourni à AIR 11 émetteurs 100 kW NX100, 10 émetteurs 200 kW NX200 et 6 émetteurs 300 kW NX300, ondes moyennes AM compatibles DRM, constituant le plus grand déploiement de radio numérique au monde à ce jour », a déclaré Chuck Kelly, directeur commercial de Nautel pour la région Asie-Pacifique. « Nautel a [depuis] reçu un complément de commande d’AIR pour quatre autres émetteurs NX100 et deux NX200 ».

La tour de transmission de All Radio India à Mangalore, Karnataka, une des nombreuses tours couvrant la nation avec des signaux DRM.
Crédit : Gopala Krishna A via Wiki Commons

Bien sûr, déployer avec succès une technologie de diffusion numérique spécifique nécessite l’existence de récepteurs radio numériques compatibles. La grande disponibilité de récepteurs DAB/DAB+ en Europe a été au coeur de la réussite actuelle du média dans cette région.

À l’inverse, le manque de récepteurs DAB a condamné le déploiement du DAB au Canada à la fin des années 1990. Ce manque de récepteurs a eu pour résultat que les émetteurs DAB qui diffusaient simultanément les services AM/FM du pays dans les grandes villes du Canada ont finalement cessé d’émettre. À l’heure actuelle, certains radiodiffuseurs privés canadiens déploient des émetteurs de HD radio conçus par les États-Unis à titre expérimental.

En Inde, il y a un réel effort pour avoir des récepteurs DRM domestiques abordables sur le marché, accessibles aux auditeurs de radio indiens. « Un fabricant national indien a déjà développé un récepteur DRM autonome », a déclaré Pal.

« Certains constructeurs automobiles ont également incoporé une réception DRM dans leurs systèmes audio intégrés. Notre industrie interne de récepteur considère comme une très bonne opportunité de répondre à cette demande intérieure et aussi de produire des radios DRM pour l’exportation ».

Le prix actuel du premier récepteur DRM/MW(AM)/FM fabriqué en Inde, l’Avion Electronics AV-DR-1401, est de 189 $ US. Par rapport au coût des radios MW/FM conventionnelles, c’est assez cher dans un pays où 29,8 % de la population est en dessous du seuil de pauvreté, d’après le World Factbook de la CIA.

« Le prix des récepteurs numériques DRM autonomes est certainement une préoccupation à l’heure actuelle », a reconnu Pal, « mais je suis sûr que les prix vont très vite baisser avec la demande, comme nous l’avons vu dans le déploiement de nouvelles technologies dans de nombreux autres domaines. La disponibilité éventuelle d’une réception DRM intégrée dans les téléphones portables augmentera encore la popularité des services numériques DRM ».

PAKISTAN

L’ingénieur broadcast senior de PBC, Ghulam Mujaddid, installant l’émetteur FM GatesAir avec l’équipement DRM+ RFmondial pour des tests de laboratoire à Islamabad, au Pakistan.
Crédit : Pakistan Broadcasting Corp.

Contrairement à l’Inde, le radiodiffuseur public du Pakistan Pakistan Broadcasting Corp. (Radio Pakistan) est intéressé par la possibilité de déployer le DRM+ d’abord sur la FM, puis éventuellement sur les ondes moyennes. En fait, le pays a déjà commencé sur le terrain des tests de DRM+ dans la bande FM, dans ses installations d’Islamabad.

La décision de PBC de se concentrer d’abord sur la radio numérique FM est motivée par l’importante population urbaine en pleine expansion du pays, et le fait que ce public en pleine expansion technologique est aussi plus aisé que la population rurale.

« Le taux d’alphabétisation est beaucoup plus élevé dans les villes métropolitaines, ainsi que son pouvoir d’achat de nouveaux récepteurs DRM numériques, par rapport aux zones rurales », a déclaré Ghulam Mujaddid. Il est ingénieur de radiodiffusion senior de PBC, membre du Comité de pilotage DRM de PBC et membre observateur du Comité international de pilotage du DRM au sein du Consortium DRM. « Il convient également de mentionner que le coût initial de l’équipement requis pour la transition en DRM+ des émetteurs FM est beaucoup plus faible que celui du DRM-30 pour les émetteurs AM », a déclaré Mujaddid.

Une capture d’écran du récepteur DRM+ professionnel de PBC montrant une transmission live de test DRM+ à Islamabad, au Pakistan.
Crédit : Pakistan Broadcasting Corp.

L’allocation actuelle de spectre de diffusion du Pakistan explique pourquoi le pays a choisi le DRM par rapport au DAB. « Le DAB utilise la bande III (174 MHz à 240 MHz), qui est déjà occupée par le réseau de télévision terrestre pakistanais et d’autres services », a déclaré Mujaddid. « Le DRM+ fonctionne dans la bande II (88 MHz à 108 MHz), qui est déjà la bande prévue pour la diffusion FM. C’est donc assez facile et confortable pour nous d’utiliser la même bande de FM pendant la transition vers le standard DRM+ ».

Le fait que l’Inde déploie le DRM a également influencé le choix du DRM par rapport au DAB par le Pakistan. La compatibilité de diffusion avec votre voisin proche compte.

À l’heure actuelle, PBC a 20 émetteurs FM entièrement compatibles avec le standard de diffusion DRM+ dans le pays et prévoit d’acheter 20 autres émetteurs compatibles DRM+ au cours de l’exercice financier 2017-2018. PBC possède déjà des émetteurs MW/AM de 10 kW, 100 kW et 400 kW parfaitement compatibles pour des diffusions avec le standard DRM-30.

Le fait que PBC puisse exploiter ses émetteurs existants et nouveaux en mode dual DRM/analogique a été un élément commercial moteur en faveur du DRM. « À l’inverse, les émetteurs DAB ne prennent pas en charge l’analogique et ne fonctionnent qu’en mode numérique », a déclaré Mujaddid. « Nous ne pouvons donc pas utiliser les deux modes à partir d’un seul émetteur DAB ». Le coût a également donné l’avantage au DRM sur le DAB : « Les émetteurs FM, qui transmettent normalement des signaux analogiques, peuvent facilement être convertis en DRM+ en leur ajoutant simplement un petit morceau de hardware », a-t-il expliqué.

Bien que PBC soit impatient de commencer à déployer le DRM+ et ensuite aussi le DRM-30, il n’y a aucne précipitation pour fermer la FM et les ondes moyennes. « Il n’y a pas de date précise à laquelle le déploiement serait terminé, tout dépend des facteurs et des défis dont nous avons déjà discuté », a déclaré Mujaddid. Cela dit, « PBC est déterminé à mettre en place le standard de radio numérique dans le pays pour fournir des programmes efficaces et de meilleure qualité au peuple du Pakistan ».

BRÉSIL

Depuis 2012, le Brésil a deux raisons pour vouloir déployer le DRM. Tout d’abord, le pays s’intéresse avant tout à la diffusion numérique. Deuxièmement, lorsque le gouvernement national « a fait un appel public pour que les standards de radio numérique se présentent pour être testés au Brésil, le DAB n’est pas venu », a déclaré Marcelo Goedert, propriétaire de la société brésilienne d’équipement audio Audio Fidelity Produções Ltda et représentant brésilien du Consortium DRM. « Donc, le DAB n’a jamais été officiellement pris en consideration par le Brésil ». Ajoutez le fait que le Brésil est un très grand pays — « toute solution de radio numérique doit tenir compte des transmissions à longue distance via les ondes moyennes et ondes courtes », a déclaré Goedert, « et le DRM était le bon choix ».

Malheureusement, les troubles économiques et politiques en cours retardent l’adoption du DRM par le Brésil comme standard de radio numérique. Dans l’intervalle, des essais de DRM sur le terrain sont en cours. Plus précisément, les signaux DRM-30 ont été testés en diffusion par Brasil de Comunicação, le radiodiffuseur public du Brésil, sur 9,740 kHz ondes courtes, depuis la fin octobre 2016.

« Nous utilisons un émetteur DRM de 150 W de faible puissance installé au Rodeador Site à Brasília, la capitale au centre du pays », a déclaré Goedert. « Le but de ce test est d’évaluer le comportement de l’équipement, la qualité du signal et la stabilité du système. En raison de la faible puissance, on ne s’attendait pas du tout à une grande couverture, mais, malgré tout cela, le signal a été détecté partout au Brésil — et il y a eu des signaux intermittents reçus en Nouvelle-Zélande ». Un nouveau test débutera en avril 2017 avec un émetteur de 1 kW, depuis le même site.

En ce qui concerne l’équipement, le Brésil a un fabricant d’émetteurs domestique, BT-Broadcast Transmitters, qui fabrique des émetteurs DRM vendus localement et dans d’autres pays. « Les récepteurs pour le test viennent d’Inde », a souligné Goedert. « Comme nous n’avons pas encore de radio numérique, aucune entreprise n’a encore commencé à en fabriquer dans le pays ».

« Le principal défi pour le Brésil est le retard gouvernemental pour définir des paramètres pour la radio numérique », a conclu M. Goedert. « L’autre défi est la diversité de la radio brésilienne. Nous avons environ 10 000 stations de radio réparties entre les secteurs privé, public, éducatif et communautaire, toutes avec des intérêts et des priorités différents. Il est donc très difficile de trouver un accord sur les politiques et les standards techniques de la radio ».

UN BRILLANT AVENIR

Collectivement, ces trois pays et leur intérêt pour le DRM montrent comment cette technologie radio numérique a finalement trouvé sa place sur la scène mondiale. Le DRM n’est plus un joujou d’ingénieur : c’est maintenant un standard de diffusion crédible.

Avec un tel résultat, la tâche du Consortium DRM consiste maintenant à capitaliser sur la dynamique du DRM et à l’utiliser pour attirer d’autres pays vers ce standard.

« Une plus large adoption et utilisation du DRM reste l’objectif », a déclaré Obreja. « Cela va de pair avec l’augmentation du volume des ventes ou d’intégrations de récepteurs, ce qui devrait permettre d’établir la radio numérique comme standard et d’amener la radio là où il convient : comme l’intégrateur suprême et le lien omniprésent pour toutes les plates-formes numériques nouvelles et anciennes ».

James Careless couvre l’industrie pour Radio World depuis Ottawa, en Ontario.

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